Infrastructures de transport et d’énergie, territoires, écosystèmes et paysages : quel rôle pour la recherche ?

Vendredi 28 Octobre 2022
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Yannick AUTRET, Secrétaire du programme national de recherche ITTECOP
Commissariat général au développement durable - Service de la recherche et de l'innovation

Depuis 2008, le ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires et ses partenaires soutiennent, avec le programme ITTECOP, une communauté de recherche appliquée toujours plus importante capable de développer une approche holistique des infrastructures et de leurs interactions avec les territoires traversés. Ce sujet trouve aujourd’hui un écho croissant au niveau européen et international.

                                                                                            La route ? Là où on va, on n’a pas besoin de route !
                                                                                            Retour vers le futur, Dr. Emmett Brown.

Les infrastructures de transport ou d’énergie exercent une pression directe sur les écosystèmes. Il est nécessaire de penser les interactions dans un cadre plus complet via une mobilisation des acteurs de la recherche. Ce processus a abouti à la création en 2008 du programme national de recherche ITTECOP (Infrastructures de transports, territoires, écosystèmes et paysages) par le ministère de la Transition écologique, en coordination avec l'Ademe. Ce programme vise, depuis sa création, à appuyer l’ensemble des acteurs opérationnels publics comme privés. Les infrastructures y sont abordées de manière globale (fluviales, ferrées, routières ou énergétiques) ainsi que leurs interfaces avec les territoires (gares, ports ou aéroports) dans une approche intégratrice de leurs effets : écologiques, territoriaux, sociaux, économiques, paysagers ou patrimoniaux.

Le programme ITTECOP contribue à alimenter une réflexion forte et constante sur l’intégration des questions relatives aux écosystèmes et aux paysages lors de l’élaboration et de la réalisation de projets d’infrastructures ou l’adaptation d’aménagements existants.
Les projets de recherche sont ainsi utilisés comme outils de dialogue et de compréhension mutuelle entre les acteurs des infrastructures et de l’environnement. La création progressive d’un patrimoine de savoirs communs a permis de soutenir une prise de risques dans les sujets proposés, liant ainsi étroitement recherche et besoins opérationnels.

Ce processus de dialogue public-privé s’est accompagné en parallèle d’une réflexion sur les dynamiques en cours à l’étranger et sur la manière dont les travaux menés pouvaient y trouver écho.

Aujourd’hui, un sentiment d’urgence face à ce que William Lawrence qualifie, lors de l’IENE 2016, de "tsunami d’infrastructures" se développe. D’ici 2050, le linéaire routier mondial augmentera de 50% pour atteindre 60 millions de kilomètres, les réseaux énergétiques devraient quant à eux connaître une croissance d’environ 5% par an, effet encore accentué par le besoin d’accélérer la transition énergétique et de répondre à la nécessité de multiplier les sources de production énergétiques, enfin, au moins  50 000 milliards seront investis dans les transports.

Face à ce défi, la COP 14 de la Convention sur la diversité biologique, à travers sa décision adoptée en novembre 2018, marque la première inflexion internationale pour une approche ouverte multi-infrastructures et multidisciplinaires des effets de ces réseaux sur les écosystèmes. L’enjeu est donc maintenant, d’amplifier ce mouvement, et d’y contribuer pour développer des outils conceptuels et opérationnels en appui à un cadre de travail ouvert et unifié allant des échelles très locales aux échelles internationales. Cette démarche est facilitée par le projet européen H2020 (au titre des actions de coordination et de soutien) BISON, premier du genre sur ce sujet. Ce projet de nature stratégique fédère 45 partenaires dont 16 ministères européens des transports. Il vise notamment l’identification des besoins futurs en matière de recherche et d'innovation pour une meilleure intégration de la biodiversité dans le cycle de vie des infrastructures. Les objectifs de soutenabilité affichés par l’Union européenne pour le développement d’investissements durables dans le domaine des infrastructures de transport et d’énergie nécessitent toutefois le développement de ressources nouvelles et le développement de passerelles tout juste ébauchées entre communautés du transport et de la biodiversité. L’expérience acquise par la France et ses partenaires pour soutenir une recherche en appui aux acteurs opérationnels sur ce sujet est une vraie opportunité pour participer activement aux changements transformateurs appelés par l’IPBES.