Paroles d'acteurs

Discontinuités écologiques et continuités dynamiques sur le littoral !

Marc DUNCOMBE

Par définition, la politique des trames se tisse dans les continuités. Lorsque la trame est verte et bleue, elle conjugue l’eau et la biodiversité ; l’eau douce, mais aussi l’eau de mer. Qu’un poisson puisse suivre ses cycles biologiques entre la mer, les estuaires et les fleuves, que les invertébrés ou des batraciens réussissent à cheminer le plus librement possible entre différents espaces nécessaires à leur alimentation et à leur reproduction, ou encore que les promeneurs puissent trouver des parcours de proximité et d’aménités sans être suffoqués par des gaz d’échappement ou des murailles urbaines, sont autant d’histoires naturelles et humaines parmi des millions d’autres qui justifient l’organisation de ces trames.

La notion de continuité est facile à représenter et à cartographier, mais elle ne doit pas masquer que la richesse écologique bénéficie aussi des discontinuités dans l’espace et dans le temps. Les lisières au sens large sont les espaces de rencontre entre des facteurs, anthropiques, naturels (chimiques ou physiques) qui s’avèrent écologiquement complémentaires, justement parce qu’ils sont différents. Les lisières s’enrichissent des évolutions dans le temps et dans l’espace. Le littoral en est une illustration historique et contemporaine.

L’érosion des rivages, lorsqu’elle n’est pas ralentie par des trains d’enrochements, conduit à de formidables reconquêtes de la mer vers l’intérieur des terres. Ainsi, aucun hectare du Conservatoire du littoral n’est-il vraiment perdu à la mer ; lors des submersions, se recomposent des écosystèmes de transition et de lisières : des vasières, des lagunes, des étangs littoraux, de nouvelles prairies humides, des herbus ou même des mangroves se développent et s’entrelacent dans la rencontre complexe entre le monde de la terre de l’eau et celui du sel. Mais si cette nouvelle trame d’espaces littoraux conduit à l’omniprésence des milieux halophiles, la diversité biologique s’en trouvera altérée. Il faut donc conjuguer la continuité dynamique et spatiale avec la gestion des discontinuités écologiques. La notion de naturalité sur les rivages est fortement contrariée par la pression des activités anthropiques qui s’y exercent et en conséquence, la limite de la naturalité, au sens philosophique, c’est qu’il est devenu nécessaire de gérer la nature, parce qu’elle est contrainte.

Chef du Département de l'action foncière
Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres

Il est donc important d’anticiper ces évolutions, et que les acteurs tissent ensemble les mailles de cette future diversité des écosystèmes littoraux : pour le Conservatoire par exemple, cela consiste à préparer des acquisitions foncières en recul des rivages, pour recomposer des prairies humides dans des sites à forte intensification agricole comme les polders, alors que les prairies humides actuelles de premier rang auront été remplacées par des milieux salés.

La stratégie d’intervention à long terme du Conservatoire, validée en 2015, s’est attachée à intégrer les politiques des autres opérateurs de protection que sont les Conseils généraux, les services de l’Etat, les Etablissements publics… Ainsi, 700 000 ha de zones littorales à enjeux forts ont été identifiés alors que les moyens accordés à l’action foncière ne couvriront que 320 000 ha à l’horizon 2050. Il faut donc poursuivre la réflexion commune sur la répartition des responsabilités en matière de protection du littoral et s’attacher à développer une gouvernance partagée et prospective de ces trames.

De l’élaboration à la mise en œuvre des SRCE, de nouveaux défis pour 2016

Geneviève Gaillard

2015 a été une année importante pour la Trame verte et bleue (TVB) puisque la quasi-totalité des régions ont finalisé leur Schéma régional de cohérence écologique (SRCE). La planification française dispose à présent d’une base de connaissance sur les continuités écologiques, unique en Europe ! La France s’est ainsi dotée d’une infrastructure verte qui répond aux enjeux et aux engagements communautaires, mais également à l’adaptation aux effets du changement climatique.
En tant que présidente du Comité national « Trames verte et bleue » (CNTVB), je tiens donc à remercier et vivement féliciter tous les élus de l’ensemble des collectivités, des Comités régionaux « Trames verte et bleue », les équipes des Conseils régionaux, des Directions régionales de l’environnement de l’aménagement et du logement, les associations et les scientifiques qui ont œuvré pour accomplir cette démarche dans un esprit participatif.

Vient maintenant le temps de la mise en œuvre des plans d’action stratégique, étape toute aussi importante. Engager des opérations de restauration des continuités écologiques pour limiter les effets de la fragmentation des territoires est une nécessité. Au niveau national, plusieurs actions ont été entreprises en 2015 et devraient se prolonger cette année dont la démarche « Territoire à énergie positive et croissance verte » et le programme d’investissement d’avenir avec son volet PME Biodiversité. Il faut également souligner les partenariats État-Région, grâce notamment aux financements contractualisés dans le cadre des CPER et aux fonds européens, qui devraient aussi monter en puissance. Après la réforme des territoires de 2015, les Régions deviennent des acteurs majeurs de la biodiversité. Les réflexions en cours sur l’intégration du SRCE dans le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires en témoignent.
L’aboutissement du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, est une priorité pour renforcer les politiques en faveur de la biodiversité, dont la TVB. Cette loi permettra la création de l’Agence française pour la biodiversité qui sera l’interlocuteur privilégié pour accompagner les acteurs de la biodiversité et de l’aménagement du territoire. Elle instituera également un comité national de la biodiversité au sein duquel le CNTVB se transformera en commission permanente. En tant que députée et rapporteure du projet de loi à l’Assemblée nationale, je contribuerai avec conviction et engagement à cet élan majeur pour l’environnement.

Députée des Deux-Sèvres
Présidente du Comité national Trame verte et bleue

C’est aussi en tant que présidente du CNTVB que j’ai souhaité lancer le chantier de l’évaluation de la politique TVB. Cette démarche contribuera à l’animation et au suivi de la mise en œuvre des SRCE. Je souhaite que les nouvelles régions, futurs acteurs incontournables de la biodiversité, y soient fortement associées. Une journée sera consacrée à ce sujet en septembre prochain en lien avec les acteurs locaux.
Une nouvelle étape s’ouvre donc à tous les acteurs, pour construire une mobilisation plus étendue en faveur de la TVB sur tous les territoires avec l’appui du centre de ressource pour la TVB.
Cette année 2016 s’annonce riche et intense. Je fais le souhait qu’elle soit un moment majeur pour la biodiversité. Meilleurs vœux à tous pour l’année 2016 !

Quel rôle des continuités écologiques en régime de changement climatique ?

Vincent Devictor

Le climat change. Mais où ? Dans quelle direction, et avec quelle intensité ? Après la reconnaissance d’un réchauffement climatique global qui se répercute en France (dont les températures moyennes ont progressé de 1°C environ en 20 ans), voici venu le temps de préciser les conséquences des variations climatiques dans le temps et dans l’espace. Pour cela il faut être capable de cartographier l’ampleur et la direction du déplacement des températures et des espèces. La question des continuités écologiques prend alors tout son sens car l’on peut enfin mesurer leur rôle concret pour tamponner les effets des variations du climat et de la dégradation de l’environnement. Comment peut-on s’y prendre ?

L’analyse minutieuse de données récoltées de manière standardisée sur notre territoire permet d’y voir plus clair. Le Suivi Temporel des Oiseaux Communs animé par le Muséum National d’Histoire Naturelle permet de suivre la variation de l’abondance de plus de 200 espèces d’oiseaux sur près de 1000 sites depuis 15 ans dans toute la France. Avec une telle information, des analyses statistiques ont pu confirmer que la composition des communautés d’oiseaux est de plus en plus de type méridionale : nos communautés d’oiseaux s’enrichissent en individus qui préfèrent les températures chaudes. Mais nos recherches récentes vont plus loin : ce changement de composition permet de calculer une vitesse et un sens de déplacement. Nous avons aussi pu évaluer si ce déplacement local était influencé par l’environnement. Les résultats sont encourageants : la qualité du paysage, son niveau de protection et sa diversité permettent de favoriser le déplacement local des communautés d’oiseaux soumises aux variations locales des conditions climatiques.

Chargé de recherche CNRS
Équipe Evolution et Ecologie des Communautés
Institut des sciences de l'évolution de Montpellier - ISEM

Les continuités écologiques ont bel et bien un rôle clé à jouer dans un monde qui bouge. L’intégrité des habitats doit être pensée à large échelle pour permettre aux individus de suivre le déplacement des températures et trouver dans les zones protégées autant de refuges et de haltes de dispersion. Ces recherches révèlent aussi l’importance de la mise à disposition de données de haute résolution sur l’état et la dynamique des paysages au niveau national. C’est à partir de ces données qu’une évaluation de l’efficacité des continuités écologiques peut être envisagée et que des propositions de conservation et de restauration pourront être formulées.

TVB et Natura 2000, deux politiques convergentes pour protéger la biodiversité ?

Mara Rihouet

Trame verte et bleue (TVB), Natura 2000, deux politiques aux contours différents mais partageant la même ambition, celle de préserver la biodiversité. Partant de ce constat, l'Aten s'est associé à la Fédération des PNR pour interroger les complémentarités et synergies entre ces deux politiques lors d'une journée d'échanges qui s'est déroulée le 10 septembre dernier.

L'expérience de la mise en œuvre de Natura 2000 depuis une quinzaine d'années doit servir à la TVB, via la mise à disposition des connaissances scientifiques, la mutualisation des pratiques de gouvernance (connaissance et implication des acteurs locaux notamment), ou encore la mobilisation des outils de financement (MAEC, contrats Natura 2000, etc.). Il faudra cependant veiller à éviter les écueils du passé (difficultés d'acceptation locale pour Natura 2000, etc.).
Un des objectifs des Directives Nature (Habitats Faune Flore et Oiseaux) était de créer une cohérence écologique en faveur des habitats et espèces d'intérêt communautaire. Celui-ci doit donc être poursuivi et renforcé avec le déploiement de la TVB. La mise en réseau de sites naturels de qualité devrait ainsi permettre l'amélioration de l'état de conservation des zones Natura 2000, que ce soit en termes de fonctionnalité ou de naturalité.
Il est par ailleurs nécessaire d'aller vers une vision intégratrice de toutes les politiques de conservation de la biodiversité, au niveau de la communication, de l'organisation des services, de la mise en cohérence des moyens, etc. Le SRCE pourrait représenter un outil en ce sens.
Cependant, le changement d'autorité de gestion pour les financements européens, l'évaluation des deux Directives européennes, mais aussi la diminution des postes dédiés, sont autant de facteurs qui fragilisent le fonctionnement du réseau Natura 2000 mais plus globalement les politiques (telles que la TVB) qui peuvent s'appuyer sur les outils mis à disposition.

Il s'agit donc d'innover et de faire partager les expériences probantes pour mobiliser l'ensemble des parties prenantes sur nos territoires. Dans cette optique, la future Agence Française pour la Biodiversité et la création d'un Centre de ressources national réunissant les plateformes existantes, dont Natura 2000 et TVB, permettra d'aller vers une mobilisation générale face à la dégradation rapide de la biodiversité. Les missions qui sont les nôtres seront ainsi renforcées et amplifiées, pour accompagner au plus près de leurs besoins l'ensemble des acteurs concernés.

Chargée de mission Natura 2000
Aten

Les acteurs publics de la politique de l'eau au service de la Trame verte et bleue

Didier Taillefer
Franck Solacroup

La Trame Verte et Bleue est constituée de milieux à forts enjeux environnementaux en termes de gestion de l’eau et de préservation de la biodiversité. Ils contribuent au bon état écologique des masses d’eau. Dans le cadre de son 10ème programme d’intervention (2013-2018), l’agence de l’eau Adour-Garonne présente de multiples modalités d’aides financières auprès des collectivités pour la préservation de la Trame Verte et Bleue. On peut citer :

  • L’entretien et la restauration des cours d’eau visant à la diversité des habitats et des espèces aquatiques,
  • La restauration de la continuité écologique sur les cours d’eau et la réduction de l’impact des ouvrages sur les milieux pour favoriser notamment la libre circulation des poissons migrateurs,
  • La gestion et la préservation des zones humides, précieux espaces à forte valeur biologique contribuant à la régulation des eaux tant au niveau qualitatif que quantitatif.

Cette politique d’accompagnement financier s’inscrit dans un contexte réglementaire renouvelé : le classement des cours d’eau d’une part, la compétence des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) en termes de « gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations » - GEMAPI – issue de la Loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) du 27 janvier 2014 d’autre part.

Par ailleurs, dans le cadre du rapprochement des politiques eau et urbanisme, l’agence de l’eau peut apporter un soutien financier auprès des structures porteuses de SCoT et de PLU intercommunaux pour l’élaboration d’un diagnostic eau pouvant comprendre l’approche TVB.

Directeur du Département Ressources en Eau et Milieux Aquatiques
Agence de l’Eau Adour-Garonne

         

Le rôle de l'implication citoyenne dans la Trame verte et bleue

Emeline Bentz

Trame Verte et Bleue, SRCE, PLU,… Autant de mots qui occupent les collectivités, les urbanistes et autres professionnels des territoires depuis quelques années. Mais qu’en est-il pour les citoyens qui observent cela de loin, en surfant sur le site de leur Région ou en recevant des invitations pour des réunions publiques ? Pourquoi et comment les impliquer dans les concertations autour de ces sujets ?

Pour répondre à ces questions, une journée d’échanges nationale sur « Le rôle de l’implication citoyenne dans la Trame Verte Bleue » a été organisée le 8 avril. La Fondation Nicolas Hulot s’est associée à cette journée car l’engagement citoyen pour la nature est un de ses projets phare. En effet, elle a créé, en 2010, la première plateforme nationale du bénévolat nature « J’agis pour la nature » et co-anime depuis 2012, avec l’UNCPIE, le Collectif National Sciences Participatives - Biodiversité. La Fondation observe donc régulièrement des exemples de projets où les citoyens sont impliqués dans la co-construction de projets d’aménagement de leur territoire (Les Blongios) ou dans l’évaluation des effets de sa fragmentation (Picardie Nature). Les exemples présentés lors de cette journée convergent tous vers les mêmes enseignements pour le territoire :
        - L’implication citoyenne est nécessaire pour une meilleure compréhension et acceptation
           des projets d’aménagement ;
        - Elle permet de valoriser les savoirs et savoirs-faire des habitants ;
        - Elle permet un rapprochement convivial entre tous les acteurs (même s’il y a parfois des désaccords, on arrive très souvent à un consensus) ;
De l’avis de tous, également, les outils mis en œuvre pour concerter et co-construire sont très importants : être concret, avoir des animations ludiques (faire appel aux souvenirs des habitants), aller sur le terrain et, surtout, ne pas oublier des temps conviviaux (repas, goûters, etc.).
Cette journée a donné une nouvelle façon de voir la mise en œuvre de la TVB et énonce les futurs possibles de l’implication des citoyens dans l’aménagement et la préservation de leur territoire. Quand on sait que le nombre de Français bénévoles dans une association, en France, est passé de 11,5 à 12,5 millions, entre 2010 et 2013, et que 80% d’entre eux sont de plus en plus motivés par des actions concrètes (mais pour autant ponctuelles pour 92% des bénévoles)1, il y a là un vivier de gens à satisfaire !
Et cet élan de mobilisation semble également être souhaité par la population pour faire face aux changements climatiques, en effet « près de deux Français sur trois (62 %) se disent prêts à agir à leur échelle en adoptant des gestes au quotidien susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre ». De bon augure en cette année cruciale pour le climat avec l’accueil de la COP21 à Paris en décembre 20152.

1 La France bénévole en 2014, 11ème édition – Mai 2014, Recherche et Solidarité
2 Étude de l’institut BVA pour le compte de Place to B, 19 mars 2015

Chargée de projets « bénévolat nature et outre-mer »
Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme

Une année de transition pour la Trame verte et bleue : l'aboutissement des SRCE et la mise en œuvre des plans d'action

Didier Labat


Cette nouvelle lettre d’information nationale sur la Trame verte et bleue inaugure une année riche d’actualité et de mutations pour tous les acteurs de la biodiversité. Après les travaux sur le projet de nouvelle organisation du territoire de la République qui reconfigure les compétences des Régions, le projet de loi biodiversité sera débattu dès le mois de mars tandis que les travaux de préfiguration de l’Agence française de la biodiversité ont débuté depuis janvier. Cette loi et l’Agence ont pour ambition de conforter les outils actuels de la biodiversité et de renforcer l’action publique au quotidien pour gagner en efficacité et faciliter l’action de chacun.

De nombreux changements devraient reconfigurer la gouvernance de la Trame verte et bleue au niveau national mais également en région avec le nouveau rôle de chef de file biodiversité des Régions qui dès janvier 2016 verront, pour certaines d’entre elles, leur géographie se recomposer. Là encore, de nouveaux dispositifs restent à construire pour fédérer tous les acteurs à toutes les échelles.

Ce sujet important est aussi celui de la deuxième phase de la politique Trame verte et bleue qui passe par la mise en œuvre des plans d’actions stratégiques des Schémas régionaux de cohérence écologique. Huit SRCE ont été adoptés à l’heure actuelle et l’adoption de tous ces documents est prévue pour début 2016.

Le thème de la mise en œuvre de la TVB sera également à l’ordre du jour d’une journée de réflexion organisée le 27 mars à Paris et qui vise à faire dialoguer chercheurs et acteurs de la TVB pour mieux comprendre les problématiques de chacun et recueillir les préoccupations de tous dans cette phase opérationnelle.

Le Centre de ressources Trame verte et bleue et l’ensemble des établissements associés sont mobilisés pour adapter leurs actions à ces enjeux et accompagner les changements à venir. Plus que jamais, nous serons à vos côtés pour répondre à vos attentes et à vos questions dans toutes les phases de vos projets. Vous disposez pour cela de la plate-forme internet pour accéder à de nombreuses informations techniques, juridiques et scientifiques, et nous solliciter au gré de vos interrogations complémentaires.

Chef de projet TVB & Planification

DGALN - direction de l'eau et de la biodiversité

Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie


Les corridors d’infrastructures peuvent-ils être des corridors écologiques ?

Jean-François Lesigne (CILB) et Elodie Russier-Decoster (UICN)

Une infrastructure linéaire de transport et son emprise – route, autoroute, voie ferrée, canal, rivière aménagée, gazoduc, ligne électrique - peut-elle contribuer aux continuités écologiques et de quelle manière ? Tel est le sujet sur lequel ont souhaité travailler les neuf structures membres du CILB[1] bien conscientes par ailleurs des impacts de leurs infrastructures sur la biodiversité, avec le Comité français de l’UICN France.

Lundi 3 novembre, le séminaire organisé par le CILB avec l’appui de l’UICN France a réuni 170 participants issus d’horizons très variés. A cette occasion, ils ont échangé leurs expériences et partagé leurs visions pour apporter des éléments de réponses à la question : « les corridors d’infrastructures peuvent-ils être des corridors écologiques ? » et identifier à quelles conditions cela est possible, afin d’optimiser le rôle des emprises vis à vis des corridors écologiques dans une approche globale et multi-échelles. Des exemples de réalisations françaises et étrangères ont permis de lancer un large débat qui a abouti aux principales conclusions suivantes :

  • Tout d’abord, les gestionnaires d’infrastructures linéaires réalisent de nombreux aménagements en faveur de la biodiversité. En généralisant ces expérimentations avec une vision territoriale et en les intégrant davantage à la stratégie d’entreprise impliquant l’ensemble des collaborateurs, l’impact positif sur la biodiversité serait accru.
  • Ensuite, les impacts des infrastructures sur la biodiversité peuvent être significativement diminués lorsque les entreprises anticipent les travaux en prenant en compte cette question dès la conception, travaillent en concertation avec les partenaires locaux et développent des synergies avec eux.
  • Enfin, on constate que des suivis écologiques analysant l’efficacité des actions mises en œuvre gagneraient à être développés à l’échelle des emprises et des territoires au moyen de protocoles standardisés en impliquant notamment des instituts de recherche.

Ce séminaire a constitué une étape décisive pour la poursuite des réflexions sur ce sujet. Il sera suivi d’une publication réalisée par l’UICN France à destination des décideurs publics, des acteurs des territoires, des gestionnaires, des ONG et des chercheurs. Celle-ci orientera les choix à réaliser pour l’expérimentation et l’innovation ainsi que les sujets de recherche à développer.


[1] CILB – regroupant ERDF et RTE pour l’électricité, GRTgaz et TIGF pour le gaz, RFF et LISEA pour le rail, Eiffage Concession et ASFA pour les autoroutes et VNF pour les voies d’eau

Club Infrastructures Linéaires et Biodiversité et Comité français de l’Union Internationale de Conservation de la Nature
      

La trame verte et bleue à tous les étages

Pascale POUPINOT

Cœurs verts ou lignes bleues, des vides structurants pleins de ressources organisent les territoires et définissent une trame verte et bleue d'intérêt européen, régional et local.

Une enquête réalisée dernièrement par la Fédération nationale des agences d'urbanisme a permis d'identifier plus de 200 démarches récentes ou en cours rien qu’au sein des agences d’urbanisme.

Cette récente mais néanmoins massive implication des agences d'urbanisme mobilise de nouvelles compétences, des méthodologies renouvelées et adaptées, et des partenariats inédits. Les chartes des Parcs naturels régionaux mettent également en exergue ces trames vertes et bleues, en particulier dans les espaces périphériques aux grandes métropoles.

La journée d'échanges de la Fédération des Parcs naturels régionaux de France, que la FNAU a accueillie le 9 septembre 2014 rue Joubert à Paris sur le thème « trame verte et bleue et changement d'échelle : du SRCE au PLU », a été l'occasion d'échanger des questionnements et des savoir-faire afin de mieux prendre en considération les enjeux de la trame verte et bleue. Issue du Grenelle de l'Environnement, cette notion facilement appréhendable peut être traduite dans les documents de planification, à toutes les échelles du territoire.

Les équipes des agences d'urbanisme et des Parcs naturels régionaux contribuent à identifier ces trames dans les territoires, à appréhender leur fonctionnement aussi bien dans les réservoirs de biodiversité que dans les corridors écologiques, et ainsi les préserver malgré les menaces d'expansion urbaine ou de potentielles infrastructures, à toutes les échelles.

Pourtant le principal enjeu auquel ces équipes sont confrontées demeure la restauration de cette trame verte et bleue, afin que la biodiversité soit maintenue et d'assurer de meilleurs fonctionnements des écosystèmes faunistiques et floristiques.

Une expérience de partenariat à renouveler et à suivre qui pallie le faible niveau actuel de connaissances du fonctionnement de ces espaces.

Déléguée générale de Oise-la-Vallée
Fédération Nationale des Agences d'Urbanisme

Le PLUi, une « boîte à outils » au service de la trame verte et bleue

Guennolé POIX

En établissant leur projet global d’urbanisme et d’aménagement dans un Plan Local d’Urbanisme intercommunal (PLUi), les intercommunalités peuvent prendre des dispositions volontaristes de préservation de la biodiversité.

Ce document d’urbanisme permet à la collectivité d’identifier à une échelle large, les espaces et éléments qui contribuent à la trame verte et bleue et à sa fonctionnalité, mais également de fixer les prescriptions et recommandations pour la préservation ou la remise en bon état des continuités écologiques. Chacune des pièces du PLUi peut être utilisée à ces fins.

De nombreuses grandes intercommunalités se sont déjà emparées de cet outil, souvent avec ambition. Les communautés urbaines de Brest et de Strasbourg ont par exemple consacré une pleine orientation d’aménagement et de programmation (OAP) de leur PLUi à la question de la TVB. Les autres parties du PLUi (rapport de présentation, PADD, règlement) se font également l’écho de cette problématique.

Désormais, l’enjeu est de faire en sorte que les bonnes  pratiques  en matière de prise en compte de la biodiversité se diffusent aux autres EPCI, notamment aux plus petits ; déjà, des démarches exemplaires ont été relevées sur certains territoires ruraux (cf. la CC du Vère-Grésine).

Dans ce cadre, le Club PLUi – créé en 2012 par le ministère du Logement et de l’Égalité des territoires, il regroupe services de l’État, élus et techniciens concourant à l’élaboration des PLUi – a lancé en décembre un groupe de travail national sur la prise en compte de la TVB dans les PLUi. La quarantaine de participants travaille dans trois ateliers : sur la gouvernance, le diagnostic et les outils. L’objectif est d’identifier et de promouvoir les bonnes expériences en œuvre, et de produire in fine des outils méthodologiques à destination des communautés.

Chef de projet animation du Club PLUi
Ministère du Logement et de l’Égalité des territoires

Par ailleurs, différents groupes de travail régionaux, à travers les Clubs PLUi territorialisés, se sont intéressés au sujet de la trame verte et bleue. Plusieurs témoignages d’EPCI complétés par ceux de PNR (exemple du témoignage du parc naturel régional des marais du Cotentin et du Bessin) et de responsables de schémas régionaux de cohérence écologique ont animé ces réunions.

La loi ALUR (accès au logement et à un urbanisme rénové) vient également de renforcer par diverses mesures une meilleure prise en compte de la biodiversité dans les documents d’urbanisme.

Vous pouvez retrouver l’ensemble des travaux du groupe de travail du Club PLUi sur le lien suivant

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